"Regarder" de Serge Mestre
Dernière mise à jour : 11 mars 2021

Serge Mestre nous raconte la vie hors norme de Gerta Pohorylle qui, par désir et volonté, devient Gerda Taro au travers de ses rencontres et surtout de ses affirmations successives.
Elle côtoie et partage, entre autres, la vie de celui qui deviendra Robert Capa. Plus que le côtoyer, elle inventera Robert Capa.
Mais surtout Gerda conjugue le verbe ÊTRE.
Elle EST femme et féministe. Elle EST libre et le vit au quotidien. « Je m’aperçois que je peux parfaitement être amoureuse de deux hommes. Je serais idiote de me prendre la tête pour ça. »
Elle EST photographe et le revendique (d’où son mépris quand elle est désignée comme « miss Capa »!)
Une vie à 100 à l’heure, sans frontière et sans limite.
L’auteur nous narre une très brève tranche de vie -1933/1937- au plus près de Gerda et, lorsqu’elle meurt, nous laisse endeuillé comme à la mort d’un être cher.
Serge Mestre écrit ce roman comme un reportage. Ca tombe bien Gerda Taro est reporter-photographe. Et, dans un rythme soutenu, nous emporte sur les chemins de la guerre d’Espagne. Le récit est proche d’un journal qui colle à l’actualité et nous entraîne. L’auteur semble avoir partagé sa vie…
Avec un style enlevé, précis et personnel, il n’hésite pas à « empiler » les substantifs jusqu’à circonscrire sa vision des choses : « ...la sacro-sainte ligne, la discipline, la règle, la doctrine, l’idiotisme politique... ». De même pour les adjectifs.
Dans un environnement littéraire où prolifèrent fictions et confessions, c’est un réel plaisir de lire la vraie vie d’une femme authentique et hors norme à une époque difficile et dont il nous reste la passion plus que les difficultés. Elle qui affirmait : « pour les femmes, la lutte est toujours un double engagement »
Le plus de ce très beau livre ?
Le bonheur d’avoir appris deux mots : escobarderie ET petrichor !!!
ET celui d’avoir envie de continuer à rencontrer Gerda au travers d’autres ouvrages.